Le pouvoir algérien monnaye sa survie au péril de la souveraineté
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Nord-Mali
Par Le Matin DZ
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Il y a 20 heures 53 minutes |
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Le
pouvoir algérien, pris en tenaille entre les rivalités sino-américaines
pour le contrôle des richesses de l’Afrique, n’a d’autres choix que de
se soumettre au plus fort ou disparaître. Éclairée par l’imposture et
l’opportunisme de Bouteflika, sa stratégie se réduit à monnayer la
survie du système au péril de la souveraineté nationale.
Pendant les moments chauds du "printemps arabe",
lorsque l’impérialisme occidental avait réussi à monter une opération
militaire pour chasser le régime tyrannique de Kadhafi et s’emparer de
ses richesses, le pouvoir algérien misait tout son espoir à ce moment-là
sur un mince veto anti-occidental et à sa tête la Chine pour empêcher
une opération similaire contre lui. Car la similitude en tyrannie entre
ces deux pays aurait justifié suffisamment aux yeux de l’opinion
mondiale une telle aventure. C’était d’ailleurs sous cette pression, que
le pouvoir algérien, pris de panique, avait annoncé des réformes tous
azimuts, d’abord pour gagner du temps et ensuite négocier sa survie avec
toutes les parties concernées, aussi bien à l’intérieur qu’à
l’extérieur. Il lui a fallu réévaluer la redistribution de la rente à
l’intérieur pour acheter la paix civile et faire des concessions
considérables aux puissances impérialistes américano-européennes et à
leurs vassaux du conseil de coopération du Golfe principalement le Qatar
et l’Arabie Saoudite. Les concessions faites aux forces impérialistes,
renforcées dans leur position par la réussite de l’opération libyenne,
ont encouragé ces dernières à les retourner en chantage permanent contre
le pouvoir algérien, l’obligeant à des concessions de plus en plus
importantes en échange de sa survie. L’évidente issue qui se profile
pour la crise syrienne, - qui se dirige inévitablement en défaveur du
régime de Damas, malgré le véto anti-occidental qui n’a pas empêché les
forces impérialistes à soutenir la rébellion financièrement,
politiquement et militairement pour inverser le rapport de forces au
profit de la révolution - est venue lui rappeler que son sort est scellé
et n’avait d’autres choix que de se soumettre ou disparaître. Sa
soumission se traduit par un bradage intempestif des richesses de
l’Algérie, aussi bien au profit des puissances impérialistes, qu’à leurs
vassaux arabes en des contrats économiques très faiblement négociés et
des concessions considérables à l’islam politique. Auquel il faut
ajouter le récent élargissement de terroristes détenus dans ses geôles,
au profit de l’idéologie wahhabite envahissante et menaçante
qu’instrumentalise l’impérialisme américain.
Avec l’entrée en scène de la crise
malienne, qui met au grand jour les rivalités sino-américaines pour le
contrôle des richesses de l’Afrique, s’ouvre un nouveau chapitre des
pressions sans relâche des forces impérialistes sur le pouvoir algérien,
qui sont venues cette fois se resserrer contre lui par le front sud. Le
mettant en demeure de collaborer à leur stratégie sous peine de le
menacer directement, par la déstabilisation du pays avec en perspective
sa partition et la disqualification de son autorité.
Alerté par la percée spectaculaire de la
Chine en Afrique pour la convoitise de ses richesses depuis une
décennie, et l’affaiblissement de l’emprise néocoloniale européenne sur
le continent, l’Empire américain n’a pas attendu la crise malienne pour
manifester ses visées coloniales dans cette région qui regorge de
richesses. Devant la crise structurelle qui affecte son modèle libéral,
entré dans une phase terminale, l’Afrique devient un continent de
prédation de première importance. Son objectif principal pour assurer sa
survie sera dès lors de contrer la progression de la Chine pour le
contrôle des richesses de l’Afrique et généralement pour le contrôle de
toutes les ressources de la planète. C’est dans la perspective de cette
Grande guerre Chine-Etats Unis, dont l’enjeu est la gouvernance de la
planète, que les Américains avaient pris l’initiative d’implanter
l’Africom en Afrique.
C’est en 2006, que les États-unis ont
décidé de quadriller l’Afrique par un dispositif militaire sous
l’appellation de l’Africom, afin de recoloniser le continent. Notamment,
par l’implantation de bases militaires plus ou moins secrètes sur
l’ensemble du continent. Le Mali est apparu dans ce cadre une cible
privilégiée, où l’Africom a entamé son implantation par des programmes
de formation au profit de près de 6 000 soldats de l’armée malienne. En
parallèle, et sous couvert d’une opération dénommée "Creek Sand",
des militaires et des entrepreneurs américains ont investi le Mali pour
des missions de renseignements. En 2009, l’armée américaine avait
envisagé l’intégration dans l’armée malienne de commandos américains et
le survol du territoire par des avions de surveillance. Aujourd’hui,
avec la crise malienne, l’intervention de la CEDEAO au Mali apparaît
comme une implantation directe au grand jour d’une présence militaire
américaine camouflée derrière des armées locales acquises au préalable à
leur cause. Avec la présence militaire américaine au Mali, l’accès aux
richesses naturelles, notamment l’uranium, devient facile à contrôler
directement et de donner une profondeur stratégique à leur action
colonisatrice, dans un premier temps en Afrique de l’Ouest et par la
suite sur tout le continent. Par cette action, l’obstruction à la
progression de la Chine dans la région devient facilement maîtrisable,
en même temps que d’empêcher toute volonté des peuples africains de
résister à l’ordre impérialiste américain.
Par ailleurs, au nord Mali, des unités
d’élite ont été investies dans des actions secrètes, officiellement sous
couvert de poursuite des groupes terroristes, qui sont probablement
encore présentes à ce jour. La lutte contre le terrorisme, inaugurée par
Bush en tant que lutte de l’"Axe du Bien" contre l’"Axe du Mal"
(représenté par le terrorisme islamiste radical), devient l’argument
rhétorique pour justifier la nouvelle offensive de la guerre
impérialiste américaine. C’est avec la collaboration des Saoudiens et
des Qataris, que cette justification s’est matérialisée et est devenue
possible. Notamment par la favorisation de l’émergence, de la
consolidation et du soutien aux groupes terroristes au nord Mali pour
servir les intérêts des Occidentaux et particulièrement ceux des
Américains. Car, l’Islam radical, globalement confondu par le terme
«terrorisme», se prête aisément à conditionner l’opinion pour mieux
faire accepter une intervention militaire. L’intérêt partagé des
Américains, des Saoudiens et des Qataris dans cette collaboration réside
naturellement dans leur projet d’islamisation de l’Afrique de l’Ouest,
sur le modèle de l’islamisation du Maghreb et de l’Égypte post "printemps arabe",
pour faire barrage à toute possibilité de démocratisation des sociétés
africaines et de l’émancipation de leurs peuples. L'hypothèse de la
poursuite d'un soutien militaire et financier par le Qatar des groupes
terroristes du Mujao, Aqmi et Ansar Eddine dans l’Azawad, dans une
stratégie de double jeu, est largement attestée par des témoins présents
sur place. C’est ainsi que plusieurs témoignages attestent que la
présence d’ONG qataries au nord Mali et au Niger (le Croissant-Rouge et
Charity Qatarie) opèrent dans cette zone sans coordination et sans
actions communes avec les autres ONG sur le terrain. Cette information a
été confirmée, y compris par un humanitaire du CICR (Comité
international de la Croix-Rouge) qui coordonne pourtant l’aide d’urgence
dans les zones de conflits. Le sentiment du comportement suspect des
ONG qataries est largement partagé par la quasi-totalité des
intervenants humanitaires dans le nord Mali, qui se plaignent du manque
de concertation en amont avec les autres ONG. L’attitude du Qatar
interroge y compris chez les Nigériens, qui s’étonnent aussi du
fonctionnement des ONG qataries, qui travaillent dans leur coin, sans
coopération et sans transparence. À noter que l’aide alimentaire rentre
au nord du Mali via le Niger, par la route. Les humanitaires sont tous
d’accord sur le fait, que le rôle exact des Qataris depuis qu’ils sont
arrivés au nord Mali, c’est bien d’aider les groupes terroristes
financièrement et logistiquement et que leur action humanitaire n’est
qu’une couverture pour un soutien moins avouable à ces groupes
terroristes. Au point que certains y voient une démarche plus politique
qu’humanitaire. Plus flagrant encore est que certains ont constaté
qu’ils plantent un drapeau dans des endroits stratégiques, ce qui
pourrait être déterminant lors d’une intervention militaire. Un acteur
économique nigérien avait lui aussi relevé des investissements qataris
suspects au Niger, qui ne sont que de grossières manipulations par des
opérations de clientélisation de personnes peu recommandables et qui
sont loin de faire du développement. Des témoins rapportent que des
avions affrétés par le Qatar atterrissent ces derniers mois dans le nord
du Mali et la nuit seulement, avec à leurs bords des cargaisons
suspectes. Il s’agit sûrement d’armement destiné aux groupes
terroristes, malgré les démentis officiels du Qatar et des services
secrets français, qui n’ont pas réussi à lever le doute des autorités de
Bamako, tenues à l’écart des réelles intentions occidentales.
Tous les "vis cachées" de cette
crise sont là ! préparer une intervention militaire avec une CEDEAO
moribonde, en même temps consolider l’ennemi et poursuivre les
négociations avec lui. Pour d’une part, permettre l’enlisement du
conflit, pour appeler en renfort l’armée américaine et justifier sa
présence sur le sol malien, et, d’autre part, dans la négociation, le
mettre en confiance pour revenir sur la scène politique après le
conflit. Armer la partie adverse, l’armée malienne, et lui dissimuler
les véritables intentions de la coalition, venue faussement la délivrer
de bandes terroristes qui occupent plus que la moitié de son territoire !
De toute évidence, les gagnants ne peuvent être que ceux qui manœuvrent
derrière les coulisses. Et derrière les coulisses, en plus des
Occidentaux avec à leur tête les Américains et le nouvel impérialisme
wahhabite, on trouve le pouvoir algérien, qui manœuvre quant à lui, pour
le seul but de sauvegarder son hégémonie sur son peuple au péril de sa
souveraineté nationale. Cet objectif ne pourra être atteint que par
l’abandon du principe de non-ingérence dans les affaires internes
d’États souverains et sa soumission au projet impérialiste américain par
la caution de l’intervention militaire au Mali. Car, jusqu'à ce jour,
l’Algérie a refusé toute intervention militaire hors de ses frontières.
Si depuis l’indépendance, cette position était surtout liée à un
principe de non-ingérence dans les affaires intérieures de pays
souverains, depuis l’avènement du "printemps arabe", elle fût
surtout motivée par la crainte de se voir elle-même l’objet d’une
intervention militaire coalisée, motivée par les mêmes conditions qui
ont prévalu dans les pays concernés par ce "printemps arabe".
Sa non-reconnaissance de la nouvelle coalition de l’opposition syrienne
est stratégique comme cela s’est passé pour le CNT libyen pour ensuite
le reconnaître après coup. Toutes ces manœuvres de soutien et de
négociations avec les groupes terroristes, arrangent en fin de compte
toutes les parties en conflit au détriment des populations locales.
L’objectif consiste à recycler les groupes terroristes les plus
accommodants et à éliminer les récalcitrants. Instaurer des régimes
islamistes dans toute l’Afrique de l’Ouest, contrôlés par l’impérialisme
américain, pour faire barrage aux véritables forces démocratiques de
ces pays, pour rendre leur inféodation facile. Car, les régimes
islamistes sont généralement plus maniables et plus perméables à la
corruption.
C’est la mission qui a été confiée à
l’Algérie. Les négociations entamées par Bouteflika avec Ansar Eddine
semblent de toute évidence avoir été imposées par les Américains, pour
amener les groupes terroristes à coopérer pour les associer, en échange,
au nouveau pouvoir qui se dessine au Mali après la résolution de la
crise. Toutefois en fixant comme objectif l’abandon formel de
l’application de la Charia par les groupes terroristes, sans pour autant
abandonner le projet d’instauration d’un État islamique dans une future
association de ces groupes terroristes au gouvernement du Mali,
maquillé sous forme de reddition. Seule condition pour faire barrage à
toute émergence d’une coalition démocratique et en écartant le MNLA
(laïc) d’un éventuel retour sur la scène politique. Ce qui vient d’être
confirmé par le groupe Ansar Eddine, promettant d’abandonner son projet
d’application stricte de la Charia et le refus du Parlement européen
d’auditionner le MNLA. Pourtant, le MNLA est le seul groupe à avoir un
véritable ancrage dans la population locale et dont l’idéologie est
véritablement démocratique et respectueuse des droits de l’homme.
L’attitude du Parlement européen s’affiche ainsi en contradiction totale
avec le principe de la politique européenne de voisinage (PEV), qui
repose sur la promotion de la démocratie et des droits de l’homme.
L’Algérie devait en prime mettre à disposition des forces américaines un
pont aérien à partir des aéroports de Tamanrasset et de Reggane et un
appui logistique à la future force africaine d’intervention dans le nord
du Mali. En toute conscience, le pouvoir algérien cautionne de fait
cette grossière manipulation de la politique impérialiste américaine en
Afrique, pour sauvegarder son pouvoir au détriment de la souveraineté
nationale.
Entre sa grande prédisposition à
l’imposture, dans la peau d’un Janus qui se joue de la crédulité de la
grande masse du peuple par le mensonge et le discours populiste, et son
opportunisme, à s’attirer la sympathie de forces antagoniques pour
dissiper toute menace sur le système despotique qui l’emploie, les
manœuvres politiciennes de Bouteflika mènent l’Algérie droit à sa perte.
Le pouvoir occulte algérien, après avoir investi pendant trois
mandatures sa confiance en Bouteflika, pour le sauver d’un naufrage
inévitable, ne trouve toujours pas de remplaçant à lui succéder pour les
présidentielles de 2014. Il est du devoir des patriotes au sein de
l’armée et du DRS, s’il en existe, de mettre fin à l’imposture et à
l’opportunisme de cet aventuriste narcissique qui agit pour une gloire,
qu’il sait chimérique, en monnayant au profit d’une junte despotique la
survie du système au péril de la souveraineté nationale. Le danger qui
guette aujourd’hui l’Algérie, c’est aussi l’opportunisme qui s’étend
dangereusement à la société civile et aux partis politiques. Une presse "libre et indépendante"
impuissante à s’exprimer, se contentant de survivre dans ce chaos en se
réservant le droit à sa part de la rente contre son silence complice.
Des organisations de la nébuleuse de l’ex-FIS et des partis politiques
islamistes déjà existants ou nouvellement constitués sont financées sans
compter par l’impérialisme Wahhabite, représentant de l’impérialisme
Occidentalo-Américain pour le Moyen-Orient et l’Afrique. Les militants
de la société civile ou de partis politiques et le peu de presse libre
qui résistent et tentent tant bien que mal de motiver les consciences à
agir, se comptent en nombre insignifiant devant la gravité de la menace
qui guette la souveraineté nationale. Jeudi 15 novembre une poignée de
manifestants ont protesté contre le soutien de l’Algérie à
l’intervention militaire au Mali, qui s’est soldée par l’arrestation des
manifestants sans ménagement. Ils maintiennent néanmoins la mèche de la
résistance à la dictature et à l’impérialisme occidental allumée par sa
faible lueur, malgré un harcèlement et une répression permanente de la
part des forces de sécurité, comme unique réponse que leur réserve un
pouvoir despotique et hégémonique, dans l’exercice de leur devoir de
citoyens.
Youcef Benzatat
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