Amale Samie est président de l’Association Asidd, une ONG qui milite pour préserver et développer Tasemmit, une vallée située au Moyen Atlas et habitée par les Aït Slimane. Les actions d’Asidd menées dans le respect de l’environnement et dans l’intérêt des habitants agacent les autorités qui font tout pour la réduire au silence. Leur but est de mettre la main sur la vallée afin d’en tirer profit matériellement au détriment de la population et de leurs droits. Pour comprendre ce qui s’y passe, nous avons rencontré Amal Samie qui a répondu à nos questions.
Tamazgha.fr : Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe exactement à Tasemmit ?
Amale Samie : Ce qui se passe à Tassemmit relève du mépris, du racisme anti-amazigh et d’un déni de justice dont souffrent les populations les plus vulnérables au Maroc. Le Massif de Tassemmitt est habité par les Aït Slimane depuis des temps immémoriaux. Et voilà que depuis l’année 2000 on veut les en déloger. Leur terre est convoitée par tout ce qui ressemble à des responsables et des élus. Et tout ce beau monde est à l’affût.
Pourquoi Tasemmit attire toutes ces convoitises ?
Parce que c’est la plus belle région de la province de Beni Mellal, la plus giboyeuse et que des rapaces de la ville, ceux qu’on appelle “les notables”, convoitent ce pays depuis l’ouverture de la piste qui n’a désenclavé la population qu’en l’an 2000.
Les “puissants” à la fortune mal acquise veulent mettre la main sur cette terre pour y réaliser des projets privés très juteux pour eux seuls. Construire des hôtels et des cafés avec la complicité des sociétés de chasse touristique, y compris en évacuant les habitants vers les bidonvilles de la plaine. Parmi eux, des élus et des gens de pouvoir qui veulent faire du Massif un fief réservé aux riches avec tout au plus 5% de la population qui sera asservie et réduite à la domesticité sur sa propre terre.
L’Association pour l’intégrité et le développement durable (ASIDD) s’est déjà battue contre la mise en route de ce funeste programme en faisant annuler, après 4 ans d’une lutte sans merci, un chimérique projet de réintroduction du Mouflon. Le projet s’étendait sur une superficie grillagée de soixante-dix hectares qui coupait le massif en deux, divisait les familles, interdisait aux habitants d’accéder à leurs champs et surtout à l’eau. Lorsque l’information est arrivée en haut lieu, le projet a été annulé. Nous avons cru que ce serait la fin des intimidations et des projets borgnes, nous nous sommes trompés. Et ASIDD est devenu l’ennemi à abattre, parce que les habitants considèrent que c’est leur association, entre autres parce qu’elle a construit deux écoles en 2006 et en 2009. Pour y parvenir, les envahisseurs ont planifié l’assassinat de la coopérative agricole Amalou que nous avons créée en 2006. Ils ont “sensibilisé” le président pour la saborder afin de semer la zizanie au sein de l’association ASIDD, s’enrichir sur le dos de gens qui ont du emprunter le montant de la cotisation, soit 500 Dh.
L’affaire de votre coopérative a été portée devant un tribunal, mais rien ne semble avancer, pourquoi à votre avis ?
Parce que le “président” Salah Oumlaid a arrosé beaucoup de monde et que la justice est défaillante, voire compromise. Je rappelle que j’ai été menacé de mort par le “président” devant 25 témoins mais que cela ne semble émouvoir personne.
Ceux qui croient que l’affaire peut être étouffée se trompent. Nous exigeons la démission du “président” Salah Oumlaid et le trésorier Salah Aïssa et les autres membres du bureau lorsqu’ils auront rendu des comptes avec tous les justificatifs ; lorsqu’ils auront restitué notre argent, notre capital et les bénéfices inouïs. Il devront également restituer les clés et les chéquiers. Toute autre solution ne fera qu’infecter la plaie. Et nous ne céderons pas !
Propos recueillis par
L. Azergui