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dimanche 4 novembre 2012

Bouteflika et la visite de François Hollande : jeux et enjeux | Algérie-France - Le Matin Algérie - Presse Algérienne au Quotidien


Bouteflika et la visite de François Hollande : jeux et enjeux

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Par Le Matin DZ | 02/11/2012 14:18:00 | 4487 lecture(s) | Réactions (3)
Selon le Canard enchainé, Abdelaziz Bouteflika aurait repoussé la visite du président français, François Hollande, initialement prévue avant le mois de décembre. Les raisons de ce report seraient de gagner du temps pour entretenir des liens privilégiés avec Washington dans la démarche à adopter dans la crise malienne et de lui permettre de relancer la polémique sur la "guerre des mémoires" au moment où sa gouvernance bat de l'aile.
A Alger, François Hollande voudra tourner la page de l'ère Sarkozy
Les autorités algériennes auraient-elles demandé à la France de retarder la visite de François Hollande initialement prévue ce novembre, dans le sillage de sa visite africaine, évitant ainsi que la venue du chef de l’Etat français ne coïncide avec le 58e anniversaire du 1er novembre et que l’Algérie ne soit pas seulement une étape parmi d’autres de sa tournée africaine dans le contexte de la crise malienne, mais qu’elle apparaisse à la mesure du rôle d'"acteur incontournable" qu’on lui prête paradoxalement pour sa "solution négociée" au Nord-Mali ?
Le journal satirique français Le Canard enchaîné qui rapporte l’information précise que c’est Abdelaziz Bouteflika qui aurait repoussé l’agenda de François Hollande de novembre à décembre en dépit des signes d’amitiés forts manifestés par l’Elysée d’abord par les visites successives de ministres, entre la mi-juillet et début octobre, après la date du cinquantenaire de l’indépendance et avant le 58e anniversaire du déclenchement de la lutte armée. Le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, s’est félicité des "objectifs"  atteints : "J'ai senti qu'il y avait un nouvel état d'esprit dans nos relations et que nous allons pouvoir faire beaucoup de choses en commun". Pour Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie, sur les pas de Laurent Fabius, début septembre: "Le président français, François Hollande, arrive en Algérie avec "des nouveaux mots, un nouveau langage, un langage très humain""
Fin septembre, c’est à Nicole Brick, ministre du Commerce extérieur de faire de sa visite en Algérie l’opportunité pour donner un nouveau souffle à la réalisation de l'objectif que se sont fixé les autorités algériennes de diversifier l'économie nationale: "Nos deux pays font de l'emploi, une priorité. Il y a de la place dans nos deux économies pour la complémentarité" Tout en qualifiant l'Algérie de "une puissance émergente intermédiaire". 
Début octobre, lors de sa visite plus remarquée que les précédentes, Manuel Valls s’est voulu plus ferme et offensif en voulant crever l’abcès du contentieux historique mais aussi aborder de front les questions liées à la lutte antiterroriste et à la crise malienne:"On ne va s'interdire aucun sujet: la relation bilatérale, la question des déplacements, la problématique de l'immigration bien évidemment et les grands dossiers qui concernent nos départements ministériels, la lutte contre le terrorisme, qui concerne très directement la France ces derniers jours, et je sais le tribut que les Algériens ont payé au terrorisme et puis le dossier du Sahel, plus particulièrement la  crise  malienne". Il a qualifié la coopération entre les deux pays en matière de lutte antiterroriste d’"excellente" : "L'information circule, nos responsables se connaissent et leurs relations sont quotidiennes", saluant "l'engagement sans faille des autorités algériennes".
Ce dimanche 4 novembre, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, effectue, lui aussi, une visite officielle en Algérie.  Dans un communiqué rendu public, l’ambassade de France en Algérie explique que "cette visite s’inscrit dans le cadre de la préparation de la visite du président de la République et du renforcement des relations économiques entre nos deux pays". Durant son déplacement, selon la même source, Arnaud Montebourg s’entretiendra avec son homologue algérien, Chérif Rahmani, ministre de l’Industrie, de la PME et de la Promotion de l’investissement.
A toutes ces visites qui dépassionnent les relations entre les deux pays en les expurgeant du contentieux historique et les situant en contrepoint des tensions et rancoeurs grossies par la visite de trois jours de Nicolas Sarkozy en 2007 sur ce contentieux même, s’ajoute le signe fort du dégel des relations par la récente reconnaissance officielle par la France des massacres du 17 octobre 1961.
Pour le Canard enchainé, donc, ces signes de détente n’ont pas suffi à Abdelaziz Bouteflika qui, rappelons-le n’a fait aucun geste politique de nature à conforter toutes ces "bonnes volontés" affichées par l’hexagone dès les premiers mois de l’élection de François Hollande. Et pour cause : aucun officiel français n’a été invité à la commémoration du cinquantenaire de l’indépendance et les appels à la "repentance" sur ses crimes coloniaux ont été réitérés à la veille du 58 e anniversaire du 1er novembre 1954. Bouteflika campe sur ses positions qui consistent à exiger de la France plus qu’une reconnaissance d’un pan de son histoire (le 17 octobre 61) mais celle de tous ses crimes coloniaux. L’espoir de tourner la page de l’Histoire, ainsi que l’avait souhaité l’ex Président Jacques Chirac à Alger, en 2003 et 2006, bute, à nouveau, sur la position rétive d’Abdelaziz Bouteflika qui s’emploie à relancer la polémique de la "guerre des mémoires" au moment où sa gouvernance bat de l’aile.
La dernière déclaration de Laurent Fabius préconisant avec Alger un "Partenariat stratégique" au lieu et place du "Traité d’amitié" de Jacques Chirac a davantage enfoncé le clou en faisant réagir Mourad Medelci dans le contexte du 58e anniversaire du 1er Novembre, promettant, avec une connotation de défi, une réponse officielle d’Alger "incessamment" (avant la visite de François Hollande).
Le journal français  rapporte, en citant plusieurs conseillers de l’Elysée, que lors de sa première visite d’Etat en Algérie, François Hollande "espérait" convaincre Bouteflika de ''pas rester les bras croisés'' face aux groupes terroristes armés d’Al Qaïda au Maghreb islamique qui contrôlent le nord du Mali. Mais, commente la même source,  les Américains  ont accompli cette tâche avant lui, citant la présence à Alger du commandant en chef US de l’Africom, le général Carter Ham et la toute récente visite éclair de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton pour exhorter l'Algérie à participer à la guerre imminente au Mali. Le Canard enchaîné laisse entendre que Washington, contrairement aux apparences, est plus décidée à renforcer l’intervention armée au Nord-Mali que Paris. Selon un officier français cité sous anonymat par la même source, Washington serait ferme que Paris dans la nécessité d’une intervention imminente au Nord-Mali : Les Américains qui "se sont battus  contre Al-Qaïda au Yémen, en Somalie, en Afghanistan et les zones tribales frontalières du Pakistan" a l’écoute d’Alger dont "le combat contre le terrorisme dure depuis 10 ans, une référence à la possibilité qu'ils restent dans le même exercice."
Mais, François Hollande, avancent d’autres observateurs, n’a subi aucune pression d’Alger sur un éventuel report de sa visite d’Etat à Alger. Au contraire de ce qui est avancé par Le Canard enchainé, Hollande n’était pas particulièrement pressé pour cette visite, préférant tâter le pouls des relations par l’envoi de ses ministres. Les quelques visites US ne lui ont guère fait ombrage. Son puissant discours de Dakar sur la fin de la "Françafrique" de son prédécesseur qui avait dit que "l’homme noir n’est pas encore entré dans l’Histoire", sa volonté déterminée à appuyer l’intervention militaire au Nord-Mali pour laquelle la France a joué un rôle de médiation appuyé auprès du conseil de sécurité de l’ONU, son influence "militaire" auprès des armées ouest africaines, plaident plutôt en sa faveur pour persuader Alger d’abandonner sa démarche du dialogue qu’Abdelaziz Bouteflika semble avoir infléchie s’alignant sur une intervention qui n’exclut pas le dialogue. De plus, la France, comme l’Algérie, partagent également les menaces qui pèsent sur leurs ressortissants détenus en otages par les groupes armés d’Al Qaïda au Sahel et au Nord-Mali. Mais la force de frappe antiterroriste de Washington depuis l’élimination de Ben Laden, est plus persuasive que celle de Paris qui découvre, sous Manuel Valls, que le terrorisme islamiste sur son sol n’est pas un produit d'importation...
R.N.

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