Concert des nations : l'Algérie cléricale aurait toujours honte du livre amazigh
La 19ème édition du Salon International du Livre et de l'Edition de Casablanca (Maroc) ouvre du 29 Mars au 07 Avril prochains (2013). La participation est ouverte jusqu'au 31 janvier 2013.
Le formulaire de participation que les éventuels participants sont tenus de remplir à cet effet est téléchargeable à partir du site officiel du Ministère marocain de la culture ; il ne comporte aucune discrimination de nature linguistique. Même si rien n'y rappelle que tamazight est désormais une langue officielle du Royaume.
Le 33e Salon du livre de Paris se tiendra, quant à lui, du vendredi 22 au lundi 25 mars 2013. Les professionnels du livre sont invités à se pré-accréditer afin d'obtenir le badge d'accès au Salon. La pré-accréditation s'effectuera prochainement en ligne, sur le site officiel du Salon. A un moment où la langue française est présente avec force dans l'aire culturelle amazighe (berbère), y compris désormais en Libye, il serait intéressant de savoir combien de livres écrits en tamazight seront présents à ce salon : ça serait une bonne manière de jauger l'état du dialogue des langues et des cultures.
L'Algérie participera à ces deux événements internationaux. Le regroupement et l'acheminement des ouvrages ainsi que la gestion du stand Algérie dans ces deux salons sont confiés à l'Entreprise nationale des arts graphiques (ENAG), entreprise dont relève le Salon international du livre d'Alger (Sila) en tant que filiale de celle-ci. Tout est beau. Cependant, dans le message que le manager officiel de cette participation a envoyé aux éditeurs et dont nous avons pu avoir une copie, ceux-ci sont invités à lui transmettre la liste de titres avec lesquels ceux-ci ont l'intention de participer à ces deux salons internationaux, en précisant que ces titres sont d'ouvrages écrits soit en arabe, soit en français, d'éditions récentes, c'est-à-dire de l'année en cours ou de l'année écoulée.
Passe que le site de l'ENAG propose à ses visiteurs un catalogue de livres édités en arabe et un autre en français, mais ne propose rien, pas même un lien non-fonctionnel (3la 3youn nnas) en ce qui est de tamazight. Mais que la suggestion ainsi faite que les livres écrits en tamazight ne feront pas partie du voyage est un indice trompeur de la honte que le manager officiel ressent à trimballer des œuvres d'esprit écrits dans une langue qui, pour lui, ne serait pas une œuvre d'esprit !
On la parle avec nos pieds, notre tamazight. Peut-être même qu'on la pète au lieu de la parler, mais on la pète désormais par écrit et cet écrit est visiblement censuré à l'ENAG, entreprise nationale, oui, mais qui ignore que tamazight est langue plus nationale que le français, oui, mais qui ignore aussi qu'elle est de même une entreprise publique et que tamazight a son public et que ce public a besoin de savoir s'il y a du nouveau au rayon de l'édition en tamazight.
Calmons-nous. L'ENAG est seulement le manager officiel de cette double participation. L'ordonnateur en est le ministère de la Culture, c'est-à-dire le Gouvernement. Et que le site de l'Entreprise nationale des arts graphiques ne propose aucun titre en tamazight, et que le manager ENAG précise qu'il est preneur de livres en arabes et en français – et donc qu'il n'est pas preneur de livres en swahili, en tchèque, en tamazight, etc.- signifie que le Gouvernement est riche pour transporter des livres écrits en arabe et en français, mais très, très pauvre, tellement pauvre qu'il ne peut payer l'édition, encore moins le voyage à nul ouvrage écrit en tamazight. Vous êtes beaux, les mecs. La République risque de prendre exemple de coquetterie sur vous…
Tahar Hamadache
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