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dimanche 19 août 2012

NAFA KIRECHE : « Renforcer la conscience nationale kabyle » | Tamurt.info - Votre lien avec la Kabylie



Entretien avec N. Kireche, Ministre de l’Anavad
La Kabylie est d’abord prisonnière d’elle-même, de sa propre propension à mener des combats qui ne sont pas les siens et qui l’épuisent.
17/08/2012 - 12:21 mis a jour le 17/08/2012 - 12:23 par Redaction tamurt
Mr Kireche, comment s’est passé votre nomination au sein duGPK ?
Ce fut rapide. Le poids de la France dans les rapports internationaux, moteur de l’union européenne avec l’Allemagne, et son influence sur ses ex-colonies font qu’il devenait urgent d’agir et de tenter d’infléchir sa position à l’égard de la question kabyle. Ayant beaucoup travaillé au sein de l’ASKAF, pour tisser un réseau en France, Ferhat m’a demandé de mettre mon expérience au service de l’Anavad. Ce que j’ai accepté avec plaisir, en ayant conscience de l’importance et de la difficulté de cette tâche.
Quel est le rôle exact de la France dans les affaires de l’Algérie ?
Son influence va au-delà de ce qu’on imagine. Le langage d’indépendance des dirigeants algériens vis-à-vis de la France n’est que du théâtre. Rien ne peut se faire au niveau international sans l’avis et l’aval de la France. Même les prises de position de la communauté internationale sur ce qui a trait à l’Algérie sont subordonnées à celles de la France.
La Kabylie est-elle prisonnière des rapports franco-algériens ?
La Kabylie est d’abord prisonnière d’elle-même, de sa propre propension à mener des combats qui ne sont pas les siens et qui l’épuisent. Pour autant, il est évident que la responsabilité de la France dans la situation où se trouve la Kabylie est immense. Avant sa défaite en 1857 contre l’armée française, la Kabylie n’a jamais été sous la souveraineté directe d’une puissance extérieure. Après la défaite de 1871, sous la conduite de Mokrani et Cheikh Aheddad, le pays kabyle a été saigné sur tous les plans. Economique par le biais d’impôts exorbitants et militaire avec des massacres de civils et des déportations, au Moyen Orient et en Nouvelle Calédonie. Sur le plan culturel et identitaire, la Kabylie a été livrée par la France à l’arabisation par le biais des bureaux arabes, chargés d’arabiser l’état-civil des kabyles et la toponymie, les noms de lieux...
Il est à noter que le régime algérien actuel ne fait que reproduire ces mêmes pratiques avec plus d’intensité. L’arabisation et l’islamisation de la Kabylie, destruction de l’environnement par les incendies qu’allument les militaires et paramilitaires du régime algérien, l’imposition des Kabyles supérieure au reste de l’Algérie, les kidnappings des hommes d’affaire et des membres de leur famille pour les pousser à délocaliser leur entreprise et pour décourager les investissements, la déportation des étudiants kabyles dans les universités des autres régions afin d’empêcher l’avènement d’une élite kabyle homogène et l’arrivée massive de populations arabophones pour déstructurer la Kabylie et détruire sa cohésion.
Il y a une triste continuité dans la situation coloniale et postcoloniale. La raison est simple : la France et l’Algérie sont toutes deux des régimes coloniaux pour la Kabylie.
Comment la Kabylie peut se sortir de cette impasse ?
Déjà, pour la première fois de l’histoire, la Kabylie s’est dotée d’un Gouvernement qui lui est propre. Le message est fort. Il s’agit de ne plus confier son destin à des puissances extérieures, à fortiori celles qui se disent "sœurs" de notre peuple, mais dont le seul but est de nous soumettre et faire disparaitre notre culture.
Comment expliquer ce sentiment de racisme et de haine du pouvoir "arabiste" algérien vis-à-vis des Kabyles, dont il connait pourtant pertinemment le rôle central et décisif dans le processus de décolonisation de l’Algérie ? Un sentiment ambivalent anime les élites arabophones vis-à-vis des Kabyles. Un sentiment d’attraction-répulsion. De haine et d’admiration.
L’antikabylisme ou le racisme antikabyle va chez eux de pair avec l’antisémitisme. Ils admirent les Juifs pour leur puissance et leurs réussites et, surtout, pour leur statut d’inventeur de la religion monothéiste, mais veulent leur destruction.
De la même façon, l’origine de l’Afrique du Nord, son authenticité, est incarnée par les Kabyles et autres Amazighes. La volonté de faire disparaitre la réalité kabyle participe d’une volonté de ne pas avoir à reconnaitre leur primauté.
En tant que ministre, quel est votre programme d’action ?
Il est établi que la France, par son statut d’ancien colonisateur de l’Algérie, possède une influence décisive, voire même la haute main, sur le régime algérien. Le président de l’Anavad a donc jugé stratégique d’établir des relations directes entre la France et la Kabylie. En effet, même au niveau international, aucune décision ne peut être prise concernant l’Algérie sans l’accord de la France. Mon rôle est donc de tisser des liens avec les partis politiques, les personnalités influentes et les diverses organisations qui comptent dans le pays afin, dans un premier temps, de les sensibiliser à la cause kabyle et, dans un second temps, d’infléchir de manière positive la position de la France sur la question.
Parallèlement, le travail d’organisation de la diaspora kabyle, et notamment des Kabyles de France, doit se poursuivre. A terme, nous devons arriver à « désalgérianiser » la Kabylie, à faire en sorte qu’elle se pense et se projette comme souveraine, sans tutelle de ses assassins sur elle. En Bref, renforcer la conscience nationale kabyle
Deuxième partie de l’entretien à la rentrée, en septembre 2012.

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